L'histoire

des unités de mesure

 

INTRODUCTION

Dans la vie courante, mais encore plus dans le monde scientifique, on a besoin d’exprimer les valeurs des grandeurs dans une unité afin d’être compris. Dans un souci de clarté, on est tenu d’utiliser des unités universelles bien définies ; mais finalement, que signifient pour ceux qui les utilisent ces standards qui définissent les mesures ?

En tant qu’étudiant, je me demande souvent à quoi correspond une grandeur que je viens de calculer : que représente un mètre ou une seconde ? Y a t’il une raison pour que l’unité de la longueur ait cette taille fixée qui semble aléatoire et non une autre ? Est-ce que le mètre correspond à un étalon naturel ou bien est t il fixé aléatoirement par l’homme ?

L’homme a inventé les unités de mesures et les considère comme universelles, ce paradoxe apparent me fait souvent me poser des questions quant à la signification des unités. Pour éclaircir ma curiosité sur les unités de mesures qui semblent avoir une définition abstraite, il est intéressant de savoir comment évolue la conception des grandeurs de mesures à travers l’histoire de la science, de comprendre pourquoi parmi toutes les unités qui existent (et au milieu desquelles on se perd souvent) pour exprimer la même grandeur, une seule a été retenue comme officielle. Quelles sont les particularités qui font que l'unité retenue est la meilleure ?

 

 

I. L’ENJEU DES D’UNITES

1) La nécessité d'unités universelles et simples

L'utilité irrévocable des unités provient du monde scientifique, mais aussi économique et commercial qui nécessitent une référence simple et fixe pour leur bon fonctionnement.

Mais on voit dans l'histoire, que les unités se sont multipliées et les volontés d'universalité et de simplicité ont rarement eu une réalité puisque les divergences d'intérêt aidant, les mesures furent longtemps rapportées à une multitude d'étalons, différents selon le lieu, l'époque et la nature du produit, la référence ayant souvent une définition complexe, l'étalon était difficilement reproductible et donc les mesures peu précises, ce qui a hélas conduit à des incompréhensions et incohérences.

Les critères de choix :

Une unité de mesure est définie par un étalon, les étalons doivent avoir les qualités suivantes :

- précision maximale (caractère déterminant car l'étalon peut donc changer si la technologie évolue et en trouve un plus précis)

- caractère naturel et invariant (dans le temps et l'espace)

- reproductible

remarque : les relations de définition sont arbitraires, et l'universalité de l'étalon ne peut résulter que d'une convention entre les hommes.

2) Des erreurs à éviter dans une société qui veut évoluer

Autrefois (avant le milieu du XVIIIe siècle), l'unité de poids variait considérablement d'un pays, mais aussi d'une province ou d'un village à l'autre, on comprend alors les problèmes économiques que cela pouvait poser, mais aussi les erreurs de communications entre les scientifiques étrangers qui échangeaient des résultats expérimentaux.

C'est à l'époque de la Révolution Française, en période de restructuration de la société que les fondateurs de la science moderne imposèrent une remise en question des méthodes archaïques de mesure. Le premier bénéficiaire de ces changements est le peuple puisque tout commerce nécessite l'expression des quantités ; mais c'est la communauté scientifique qui pousse cette évolution, puisqu'à partir d'un certain niveau, il faut qu'il y ait coopération entre les chercheurs du monde entier, qui doivent donc employer le même langage lorsqu'ils échangent leurs résultats.

La Révolution Française donne naissance au système métrique

Les grands réformateurs des poids et mesures sont Borda, Condorcet, Lagrange, Laplace, Lavoisier, Monge et Tillet, ils mirent en place un monde scientifique structuré qui donne aux sciences un aspect moderne. A la fin du XVIIIe siècle, ils sont les créateurs du système simple d'unités appelé système métrique (ou décimal), le nombre d'unités est réduit, et il existe des subdivisions en rapports simples (fractions de 10) pour chaque unité.

A l'époque, le commerce utilise principalement trois grandeurs qui sont : la longueur, le volume (il y avait des unités différentes pour les mesures de liquides et des matières sèches), et le poids. Pour chaque grandeur, on utilisait plusieurs unités (aune, pouce, pied, toise, pinte, sétier, livre, grain ...) qui n'avaient pas de rapports simples entre elles.

Le système métrique implique des relations entre chaque unité de grandeur. On définit le mètre pour la longueur, puis le volume y est directement relié puisqu'un litre est un décimètre cube, et enfin, le kilogramme est la masse d'un litre d'eau.

Si l'unité de temps, la seconde, date de l'antiquité car elle repose sur un phénomène naturel et universel, le jour, les autres unités de l'époque faisaient appel aux dimensions du corps humain (pied, pouce) certainement pratique mais sujet à des variations.

Les volontés d'universalisation

La réforme est mise en pratique par Condorcet, qui annonce à l'assemblée Nationale en 1790, au nom de l'Académie des Sciences la volonté de mise en place rapide d'un système d'unité clair et simple. Son but est d'uniformiser les poids et mesures, et il indique que le rapport entre les anciennes et les nouvelles unités sera clair. Les modèles élémentaires exacts se trouveront à Paris, mais il annonce la diffusion rapide d'étalons dans tous les chefs lieux de province, et que la clarté des informations données pour la conversion et la simplicité de la réforme permettra un changement des habitudes en six mois.

Cependant, la détermination des étalons est difficile, et en particulier celle du mètre, qui est l'unité à la base des autres. En 1791, la volonté d'universalité fait dire aux dirigeants qu'il ne faut rien d'arbitraire, ni de particulier à la situation d'un peuple sur le globe qui fasse déterminer l'étalon fondamental, c'est pourquoi, on décide qu'un mètre représentera la dix millionième partie du méridien terrestre allant du pôle boréal à l'équateur.

En 1795, la mesure du quart du méridien terrestre a été effectuée et correspond à 5 130 740 toises, l'étalon est alors construit, il s'agit d'une règle de Platine qui représente le mètre, c'est le seul étalon des poids et mesures nécessaire. Dés lors, toutes les transactions commerciales doivent être effectuées dans le système métrique, un exemplaire de la copie précise du mètre est envoyé par des commissaires dans chaque chef lieu.

En outre, on est déjà conscient de l'importance des unités pour l'évolution scientifiques et les autorités comprennent que le système métrique qu'elles instaurent doit être un système évolutif qui tente de mettre à profit les avancées les plus récentes de la science pour permettre aux scientifiques et à tous les utilisateurs industriels de disposer des outils les plus exacts.

 

Décret relatif aux poids et aux mesures.

18 germinal an 3 (7 avril 1795)

On appellera : Mètre, la mesure de longueur égale à la dix-millionième partie de l'arc du méridien terrestre compris entre le pôle boréal et l'équateur.

Are, la mesure de superficie, pour les terrains, égale à un carré de dix mètres de côté. Stère la mesure destinée particulièrement aux bois de chauffage, et qui sera égale au mètre cube.

Litre, la mesure de capacité, tant pour les liquides que pour les matières sèches, dont la contenance sera celle du cube de la dixième partie du mètre.

Gramme, le poids absolu d'un volume d'eau pure égal au cube de la centième partie du mètre, et à la température de la glace fondante.

Enfin, l'unité des monnaies prendra le nom de franc, pour remplacer celui de livre usité jusqu'aujourd'hui.

Au lieu des tables des rapports entre les anciennes et les nouvelles mesures, qui avaient été ordonnées par le décret du 8 mai 1790, il sera fait des échelles graphiques pour estimer ces rapports sans avoir besoin d'aucun calcul. L'agence est chargée de leur donner la forme la plus avantageuse, d'en indiquer la méthode, et de la répandre autant qu'il sera nécessaire.

 

 

On pouvait en effet faire plus simple !

Rapport de l'état

Des Poids et Mesures du département des Alpes Maritimes

An 5

 

Mesures linéaires

La mesure pour les distances est le trabuc de Nice, composé de six pieds ou douze pans. Le pan comme le pied se divise en douze onces. L'once en douze lignes et la ligne en douze atomes. Mais le pied et ses divisions ne sont en usage qu'en maçonnerie.

On se sert communément de la canne de Nice, qui est les deux tiers du trabuc, ou huit pans de Nice. [...]

Le pan de Nice était la mesure de commerce, avant la réunion du Département à la République, mais le pan de Marseille étant plus court que celui de Nice, les marchands seuls ont pris prétexte de cette réunion pour adopter la mesure prétendue française pour les étoffes. Ni l'aune, ni la toise de Paris ne sont connues ici. . Le pan de Marseille = 111,2 lignes du pieu de marine

Rapports simples entre les mesures linéaires de Nice et de Paris

13 toises de Paris = 8 trabucs de Nice

29 mètres républicains = 9 trabucs de Nice

17 pieds de Paris = 22 pans de Marseille

5 mètres = 19 pans de Nice

34 toises = 33 cannes de Marseille

14 pans de Nice = 33 décimètres

 

Mesures superficielles

La mesure d'arpentage est la sétérée qui se divise en seize mouteraux.
Une séterée est une superficie de 12 trabucs et demi au quarré ou de 156, 25 trabucs quarrés, ou 351, 5625 cannes carrées ou 22500 pans quarrés. [...]

 

Mesures de liquide

Elles ne sont pas en usage, les liqueurs se vendent au poids.

Poids

Les poids sont la charge, le quintal, le rub, la livre et l'once.

Rapports simples

une charge = deux quintaux ou douze rubs

le quintal = six rubs ou 150 livres

le rub = vingt cinq livres

la livre = douze onces

l'once = huit gros

le gros = 72 grains

 

Une livre poids de marc vaut 5825 livres poids de Nice

Rapports simples

19 quintaux de marc = 10 charges ou 20 quintaux de Nice

7 livres de marc = 11 livres de Nice

9 onces de marc = 6 onces de Nice

 

Mais était-ce si facile pour tout le monde ?

 

Dessin d'après Daumier dans le Charivari, 11 fév.1840.

"- Dites moi donc ! m'ame Gavin, en v'là des inventions ! j'vas m'acheter une robe et on me parle étranger; ils me baragouinent des Mètres, des Thermomètres et des Baromètres !... a-t'on vu ça !

- Et moi donc; la fruitière au lieu des quatre onces de beurre, elle m'emberlificote avec des Grammes, des Filigrammes et des Programmes ! "

 

 

 

 

 

En 1816, le système métrique est couramment utilisé en arithmétique dés l'enseignement en petites classes, afin de montrer son utilité et son application concrète. Pour les 11 - 13 ans, la plupart des exercices d'arithmétiques relient les unités de longueur, poids, volume, vitesse et prix.

En 1840, toute autre utilisation que le système légal est interdit.

 

 

 

Gravure de 1800 pour la promotion de l'usage des nouvelles mesures

 

1. le litre (pour la pinte)

2. le gramme (pour la livre)

3. le mètre (pour l'aune)

4. l'are (pour la toise)

5. le franc (pour une livre Tournois)

6. la stère (pour la demie voie de bois)

 

3) Le Bureau International des poids et mesures

Depuis le début des sciences modernes, c'est à dire la période de la Révolution Française, les scientifiques qui commençaient à avoir une activité importante ont compris la nécessité de simplifier et de structurer le système (s'il existait) d'unités moyenâgeux. Les unités utilisées à l'époque étaient nombreuses pour une même grandeur, très compliquées (la livre, le grain, l'once unités de poids étaient reliés par des facteurs quelconques : moins simples que des décimaux) et n'avaient pas d'étalon ce qui rendait les calculs pénibles et les raisonnements difficiles.

Lavoisier, un des premiers à vouloir structurer les sciences a commencé à faire évoluer les unités de mesures, mais c'est un siècle plus tard en 1875 qu'un organisme intergouvernemental, scientifique et permanent est créé, le Bureau International des Poids et Mesures (B. I. P. M.), ayant pour fonction de conserver les étalons internationaux, et d'assurer l'uniformité et le perfectionnement des mesures physiques dans le monde.

Sa Mission

Créé en 1875, cet organisme est le premier établissement entretenu à frais communs par un ensemble d'Etats pour une tâche d'intérêt mondial. Bien que, pour des raisons historiques, il soit situé en France, au pavillon de Breteuil, dans le parc de Saint-Cloud, il est indépendant du gouvernement français : son activité est contrôlée par le Comité International des Poids et Mesures (C. I. P. M.) formé des délégués des Etats liés par la Convention du mètre. Le B. I. P. M. dispose d'un personnel scientifique, de laboratoires et d'un secrétariat. Il détient les prototypes internationaux du mètre et du kilogramme. Il compare les étalons physiques des grands laboratoires métrologiques des pays fortement industrialisés. Il exécute des vérifications d'étalons aux pays qui le demandent. Il organise des réunions de "comités consultatifs" pour que les recherches métrologiques soient coordonnées et pour faire ressortir les avis des spécialistes concernant les programmes de travail et les décisions à prendre sur le plan international. Centre mondial de la métrologie scientifique, il s'occupe non seulement des étalons physiques de mesure, mais aussi de ce langage qu'est un système d'unités : le système international d'unités, forme moderne du système métrique, adopté par la Conférence générale des poids et mesures en 1960 et perfectionné ensuite, est le résultat des enquêtes et études menées à partir du Bureau international des poids et mesures ; il est sur le point de devenir le système unique d'unités en usage dans tous les pays du monde ; presque tous l'ont déjà rendu légalement obligatoire.

De 1875 à 1889

Le Bureau International des Poids et Mesures a construit et distribué une trentaine d'étalons du mètre et du kilogramme. Ce fut un travail difficile pour trois raisons.

1. Le métal choisi est un alliage de platine à 10% d'iridium, métaux réfractaires que l'on n'avait encore jamais manipulés en si grande quantité, et dont on exigeait une pureté, et une homogénéité inégalée à cette époque.

2. L'emploi de ces étalons avec une précision cent fois meilleure qu'antérieurement impliquait la connaissance de constantes physiques telles que leur dilatabilité, leur module d'Young, une échelle de température, la masse volumique de l'eau et de l'air, l'accélération due à la pesanteur. De plus, il fallait imaginer des méthodes de comparaison entre ces étalons et des méthodes pour déterminer les étalons des multiples et des sous-multiples.

3. Aucun des grands laboratoires nationaux actuels n'existait ; le B.I.P.M. était seul dans le monde avec quatre ou cinq physiciens, à aborder ces problèmes nouveaux. L'œuvre accomplie dans cette première période a donné au monde une base solide sur laquelle se sont édifiées la science et la technique industrielle avec un développement inouï et qui a transformé la vie dans les pays industrialisés.

De 1889 à 1927

Pendant cette deuxième période, le patient travail bien connu des métrologistes, qui améliore, confirme, étend les méthodes et les résultats déjà acquis, a porté sur les mesures de longueur, de masse, de température et de dilatabilité ; au cours de ces travaux fut découvert l'Invar, alliage fer-nickel à dilatabilité thermique nulle. Beaucoup de constantes physiques mesurées au B.I.P.M. à cette époque sont encore en usage : volume occupé par 1 kg d'eau sous la pression atmosphérique à son maximum de densité à la température 4°C (soit 1,000028 dm3) ; longueur d'onde dans l'air normal de la radiation rouge du cadmium naturel (soit 6438,4696xl0-10m), qui fut mesurée par Albert Michelson (1852-1931), et qui a servi ensuite d'étalon pour la mesure de la longueur d'onde de centaines de milliers de raies spectrales atomiques ; établissement d'une " échelle normale de température " au moyen d'un thermomètre à hydrogène, échelle pratiquement confondue avec l'échelle théorique de la thermodynamique ; méthodes d'emploi et de vérification d'étalons de longueur de 24 m en fil d'Invar pour la mesure des bases géodésiques, avec un gain d'un facteur 30 sur la durée des opérations sur le terrain et une exactitude de l'ordre du millionième, que l'on ne dépasse guère aujourd'hui, etc.

De 1927 à 1960

Cette troisième période a vu l'extraordinaire développement des découvertes en électricité et en physique nucléaire, avec leurs applications industrielles, et l'expansion d'autres techniques, telles que celles de l'éclairage. Le besoin d'étalons exacts et uniformes dans le monde a conduit les gouvernements à doter le B.I.P.M. de nouveaux laboratoires, dans lesquels sont conservés, comparés, étudiés ou vérifiés les étalons représentatifs de l'ohm, du volt, de la candela, du lumen ainsi que les étalons de mesure des rayonnements ionisants. Devant la diversité des compétences nécessaires pour diriger l'activité d'un tel organisme, le Comité international des poids et mesures a créé des comités consultatifs qui doivent faire le point de l'état d'avancement des progrès et de l'évolution chacun dans sa spécialité, indiquer l'orientation la plus profitable des travaux à entreprendre et exprimer l'opinion des experts sur les décisions que le Comité international pourrait prendre ou qu'il pourrait proposer aux gouvernements à la Conférence générale des poids et mesures. Ils permettent d'harmoniser les travaux du B.I.P.M. et des laboratoires nationaux, nécessité due au fait que le B. I. P. M., malgré une légère expansion, reste un petit laboratoire, comparé à plusieurs de ces laboratoires nationaux. Cependant, le caractère purement international du B. I. P. M. lui confère des responsabilités que lui seul peut assumer, par exemple d'arbitre neutre libéré de toute susceptibilité nationale, comme ce fut le cas lorsque les études expérimentales comparatives du B.I.P.M. ont prouvé la supériorité du krypton 86, parmi les trois solutions proposées par trois pays différents, pour être à la base d'une nouvelle définition du mètre. Ce rôle d'arbitre s'ajoute à sa fonction statutaire concernant la vérification ou la comparaison des étalons qui servent de point de départ aux mesures physiques dans tous les pays et aux travaux destinés à améliorer les méthodes de mesure afin de répondre au besoin d'une précision sans cesse croissante.

Après 1960

Cette quatrième période se distingue à la fois, par une élévation beaucoup plus rapide des précisions devenues possibles et exigées, et par le nombre plus grand des laboratoires, même industriels, qui contribuent au progrès des étalons et des mesures. Il en résulte pour le B.I.P.M. deux nécessités : d'une part avoir dans son personnel, qui ne comprend qu'une douzaine de physiciens aidés par une vingtaine de techniciens, des hommes du niveau de professeurs d'Université, capables d'assimiler sans délai les découvertes les plus récentes et de les mettre en œuvre ; d'autre part maintenir un contact étroit avec la recherche métrologique et ses applications dans le monde.

L'accroissement de précision résulte de deux évolutions simultanées. D'abord, la définition des unités tend à se fonder sur des constantes atomiques et non plus sur des étalons artificiels : le mètre est défini par la longueur d'onde d'une radiation de l'atome de krypton de 86 (depuis 1960), et la seconde par la fréquence d'une transition hyperfine de l'atome de césium 133 (depuis 1967) ; puis les équipements techniques pour l'exécution des mesures deviennent plus raffinés (lasers, ordinateurs, appareils électroniques). Les mesures annexes doivent suivre : c'est ainsi que la précision de 0,001 K sur la température des étalons est bien souvent à peine suffisante.

Il est remarquable qu'une organisation internationale créée dès 1875 non seulement ait survécu, mais ait pu s'adapter aux changements les plus profonds survenus en un siècle, ceux de la physique et de la civilisation technique. Un centre mondial de coordination et de décision est évidemment nécessaire dans l'activité métrologique, qui intéresse tant de pays. Mais les fondateurs ont fait preuve d'une grande sagesse lorsqu'ils ont conçu cette première institution permanente internationale, avec son mode d'administration, et rédigé un traité en peu de pages, qui n'a subi que de légères retouches en 1921. Ce traité, appelé Convention du mètre, signé à Paris le 20 mai 1875 par les représentants de dix-sept chefs d'état, auxquels se sont joints d'autres états, ce qui porte à l'heure actuelle leur nombre à quarante-trois.

 

 

II. LE SYSTEME INTERNATIONAL D’UNITES

1) Mise en place

Devant la multiplicité d’unités existantes dans les différents pays, la Conférence générale des poids et mesures avait demandé à son comité dés 1948 de mettre en place une réglementation complète des unités de mesures. Il ouvrit alors une enquête officielle sur l’opinion des milieux scientifiques, techniques et pédagogiques mondiaux afin d’établir un système pratique susceptible d’être adopté par tous les pays. L’accord est réalisé en 1960 sous le nom de système international d’unités (abrégé SI dans toutes les langues).

Ce système s'est répandu dans le monde entier au point que le Royaume-Uni, le Canada, les Etats-Unis d'Amérique et les pays sous leur influence étaient les derniers à pratiquer le système dit "impérial" (yard, inch, pound ...) ; le système métrique y était autorisé, mais n'était connu que dans les milieux scientifiques. Après le Royaume-Uni, tous ces pays sont en train de se convertir au système métrique ou ont déclaré leur intention de le faire, et le système international d'unités sera bientôt celui de tous les peuples. Il est bien sûr recommandé par toutes les grandes associations internationales scientifiques.

 

2) Avantages

Son emploi exclusif apporte une unification du langage et évite les complications, incompréhensions et erreurs occasionnées auparavant.

Il y a une seule unité SI par grandeur.

Les unités SI sont cohérentes : les relations entre grandeurs sont les mêmes que celles entre unités, il n'y a pas de facteurs numériques dans les expressions. Par exemple, on définit la vitesse par la longueur parcourue divisée par le temps mis pour la parcourir, l'unité de vitesse est donc le mètre par seconde, de simples opérations entre les grandeurs servent à définir les grandeurs à partir des grandeurs de base. Le kilomètre heure n'est pas une unité cohérente avec le système SI car il y a un facteur numérique par rapport aux unités de longueur et de temps.

Chaque unité SI peut donner naissance à des multiples ou sous multiples décimaux par l'emploi de préfixe pour plus de commodité quand l'ordre de grandeur le nécessite.

 

3) Les 7 unités de base

Les unités des grandeurs géométriques, cinématiques et mécaniques sont obtenues par combinaison des trois unités : le mètre (longueur), le kilogramme (masse) et la seconde (temps). Ces trois unités sont appelées unités de base pour cette raison. On a du ajouter le kelvin (température) et la mole (quantité de matière) pour les grandeurs thermodynamiques ; l'ampère (intensité électrique) pour les grandeurs électriques ; et la candela (intensité lumineuse) pour la photométrie. On doit ajouter deux autres unités purement géométriques : le radian (angle plan) et le stéradian (angle solide), elles sont appelées unités SI supplémentaires ; on peut alors en théorie se contenter de ces neuf unités en fonction desquelles on peut exprimer toutes les grandeurs physiques par combinaisons.

4) Les unités dérivées

Pourtant, 17 unités SI dérivées ont reçu un nom et une expression symbolique spéciale

Grandeur

Unité SI

Symbole

Expression

Fréquence

Hertz

Hz

s-1

Force

Newton

N

m.kg.s-2

Pression

Pascal

Pa

m-1.kg.s-2

Energie, travail

Joule

J

m2.kg.s-2

Puissance

Watt

W

m2.kg.s-3

Quantité d'électricité

Coulomb

C

s.A

Tension électrique

Volt

V

m2.kg.s-3.A-1

Capacité électrique

Farad

F

m-2.kg-1.s4.A2

Résistance électrique

Ohm

W

m2.kg.s-3.A-2

Conductance

Siemens

S

m-2.kg-1.s3.A2

Flux d'induction magnétique

Weber

Wb

m2.kg.s-2.A-1

Induction magnétique

Tesla

T

kg.s-2.A-1

Inductance

Henry

H

m2.kg.s-2.A-2

Flux lumineux

Lumen

lm

cd.sr

Eclairement lumineux

Lux

lx

m-2.cd.sr

Activité

Becquerel

Bq

s-1

Dose absorbée

Gray

Gy

J.kg-1

 

5) La persistance des unités étrangères au SI

Même avec le souci de n'employer que le système international d'unités, il semble impossible de faire cesser l'emploi, actuellement universel, des unités suivantes, qui sont étrangères à ce système : les unités de temps, minute, heure et jour, les unités d'angle plan, degré, minute et seconde, le litre (nom spécial du décimètre cube) et la tonne. En raison de la force des usages existants dans certains pays, le Comité international des poids et mesures estime préférable de ne pas interdire dès maintenant, dans les pays où elles sont fortement enracinées, les unités suivantes, qui sont en dehors du système international d'unités, mais qui pourront être remplacées par des unités SI : mille marin, nœud, angström, are, hectare, barn, bar, atmosphère normale, gal, curie, röntgen, rad. Les utilisateurs du système international d'unités devraient pouvoir éviter dès maintenant l'emploi de toutes les autres unités étrangères à ce système, telles que dyne, erg, poise, stokes, gauss, œrsted, maxwell, stilb, phot, fermi, carat, torr, kilogramme-force, calorie, micron, unité X, stère, gamma, etc.

Pourtant, même certains milieux scientifiques tels que l'astronomie sont très attachées aux unités spécifiques à leur discipline, car plus parlantes et plus pratiques aux échelles de grandeurs considérées : par exemple, ils utilisent le parsec, les années-lumière ou l'unité astronomique pour l'échelle de longueur car le mètre est inapproprié, mais aussi, plus paradoxalement, ils utilisent encore très couramment l'erg comme unité d'énergie alors que le joule n'est pas moins pratique, et c'est seulement actuellement que les revues scientifiques dans ce domaine s'efforcent de faire la conversion pour se faire comprendre de ces lecteurs.

On voit ainsi deux formes de résistance des unités non légales : elles sont dans tous les cas utilisés dans des disciplines spécifiques, soit par habitude de la communauté (et il est facile d'imposer le passage à l'unité légale), soit parce que l'unité légale est inappropriée du fait de l'ordre de grandeur de la mesure. Par exemple, en mécanique quantique, il peut être raisonnable d'envisager la disparition de l'angström (10-10m) car le nanomètre (10-9m) est aussi pratique et convient dans l'utilisation des formules physiques, mais l'utilisation de l'électron volt (1.6x10-19J) est plus difficile a abandonner car il convient parfaitement à exprimer l'énergie à l'échelle atomique, et donne parfois plus de sens au résultat. Mais toutefois, on est toujours confronté aux problèmes de conversion de ces unités car les formules de physique utilisent l'unité légale, et un tel oubli est fréquent et source d'erreurs importantes (en tout cas de complications), chez les étudiants par exemple.

Que conclure quant à l'utilisation des unités traditionnelles à une discipline scientifique ? On ne peut évidemment pas obliger les astrophysiciens à parler dans la même unité que les microphysiciens, car même si les préfixes existent, ils ne sont pas toujours parlant. Chaque discipline doit donc gérer au mieux ce problème d'universalité de langage pour être compris par le public, mais on peut difficilement éviter le jargon interne à chaque spécialité (qui a même tendance à ce développer). A mon avis, le rôle essentiel de l'unité unique est quand même respecté dans tous les domaines scientifiques, car toutes les formules physiques actuelles sont données dans l'unité légale, et cette universalité est essentielle pour limiter les complications et les erreurs.

 

 

 

III. HISTOIRE ET DEFINITION DES UNITES DE MESURE

1) L'unité de longueur : le mètre

Définition actuelle

Mis à part l'unité de temps, qui est définie depuis l'antiquité de façon irrévocable, l'unité de longueur, le mètre est la base de toutes les autres unités, mais ce caractère primordial n'a pas impliqué le gel de sa définition puisqu'elle a changé quatre fois en deux siècles. Aujourd'hui, il s'agit aussi d'une constante numérique fondamentale liée à un phénomène de la nature :

"Le mètre est la longueur parcourue dans le vide par la lumière pendant une durée de 1/299 792 458 seconde".

On s'aperçoit par cette définition de la complexité qu'implique la mesure de l'étalon, et de la nécessité de la connaissance de l'unité de temps.

On semble ainsi avoir atteint un caractère fixe, et propre à la nature pour la définition de l'unité de longueur, et on fait disparaître tout caractère subjectif quant à son choix, mais sa détermination fondamentale nécessite une technologie avancée. On sent que cette définition est dédiée aux applications mathématiques, mais que les mesures ne peuvent être effectuées avec des systèmes aussi complexes que la détermination de la distance de parcours de la lumière. On peut utiliser cette théorie pour se rapprocher d'une précision extrême par rapport à sa définition, mais en utilisant d'autres phénomènes liés à la propagation de la lumière.

Evolution et histoire

Les définitions obtenues ont pour objectif d'assurer la pérennité, l'uniformité, l'accessibilité et la plus grande exactitude possible des références ; elles sont de types très variés. A cet égard l'exemple du mètre, qui a connu en deux siècles quatre définitions successives, est intéressant pour appréhender ces évolutions. D'abord lié à un système supposé invariable, la longueur du méridien terrestre (1795), le mètre devient en 1889 associé au prototype international, étalon matériel particulier en plaine iridié ; les progrès de la spectroscopie et de la physique quantique conduise à retenir en 1960 un multiple de la longueur d'onde d'une radiation résonante sur une transition dans l'atome de krypton. En 1983, la définition du mètre change une dernière fois : il est désormais établi à partir du phénomène de propagation de la lumière dans le vide. La définition traduit l'existence d'une loi physique fondamentale et impose le gel de la valeur numérique d'une constante physique fondamentale, la vitesse de propagation de la lumière c, qui vaut désormais exactement 299 792 458 ms-1. Etalon macroscopique terrestre, prototype, étalon atomique, expression d'une loi physique fixant la valeur numérique en SI d'une constante fondamentale, ces quatre définitions successives montrent que ce système d'unités évolue de façon pragmatique dans le sens de la prise en compte de toujours davantage de science et de lois fondamentales.

Les premières unités de longueur

Aussi a-t-on attribué aux anciens l'idée de prendre dans la nature même le prototype de leurs mesures, afin d'en assurer l'invariabilité.

C'est ce que Bailly

et Paucton nous présentent, d'après Paucton, les mesures de toute l'antiquité auraient eu pour prototype ce qu'il appelle métrétès linéaire ou pied géométrique, dont 800 feraient un stade égal à 1/100 de degré terrestre ; et l'Egypte aurait conservé ce prototype en donnant exactement un stade de côté au carré qui sert de base à la grande pyramide. Mais ce système n'a pas résisté à la critique scientifique.

D'ailleurs on peut soutenir, avec divers auteurs anciens, tels que Héron, que les premières mesures ont été prises des dimensions du corps humain ; et c'est ce que confirment les noms de pas, coudée, pied, palme, pouce, doigt employés si longtemps et même aujourd'hui encore.

A Paris, les étalons de poids et mesures furent confiés à divers corps ou corporations, et vers 1780, ils étaient conservés aux endroits suivants :

- Toise. L’étalon légal, déposé au grand Châtelet, avait été renouvelé assez souvent, et en dernier lieu en 1766 : il fut alors pris égal à la toise du Pérou, déposée au cabinet de l'Académie des Sciences, au Louvre. Cet étalon légal était une règle de fer, à talons, scellée dans un mur accessible au public.

- Aune. L'étalon de l'aune était confié à la garde des marchands merciers, qui le conservaient dans leur bureau de la rue Quincampoix. Comme l'étalon de toise, c'était une règle de fer avec talons ; au dos, cette règle de fer portait, gravé en grosses capitales : Aune des Marchands Merciers et Grossiers, 1554 ; et elle était divisée en demies, quarts, tiers, sixiemes.... Ces subdivisions étaient d'ailleurs très défectueuses.

 

Aune de Paris en fer, mesures de 1554, 1668 et 1732.

Les valeurs de l'aune en 1790 :

- 1,188 m à Paris

- 1,118 m en France

- 0,6669 m en Prusse

- 0,833 m en Bavière

- 0,7776 m en Autriche

- 1 m en Belgique

Le premier étalon naturel : du méridien terrestre à l'étalon en platine

Il fallut donc attendre que la Science eût trouvé un étalon naturel, et le moyen de le rétablir aux besoins avec facilité : c'est ce qui eut lieu dans la seconde moitié du XVII ème siècle.

En 1670, en effet, Gabriel Mouton, vicaire à Lyon, propose un système de mesures extrêmement remarquable, dont le prototype est emprunté à la grandeur même de la Terre. Après avoir montré, par les trop nombreux exemples que présente le passé, combien il est difficile de conserver aux mesures une longueur invariable, il propose un ensemble de mesures linéaires, dites par lui géométriques, qu'il assujettit à la division décimale, et qu'il appelle milliare, centuria, decuria, virga, virgula, decima, centesima, millesima. Le milliare ou mille serait la longueur de l'arc de grand cercle de la Terre, de sorte que la virga et la virgula (1/1000 ou 1/10000 du mille géométrique) auraient répondu à la toise et au pied.

Ensuite, partant des nombres acceptés alors pour la grandeur de la Terre, et qui donnaient au degré 321 815 pieds de Bologne (Riccioli), il trouve que sa virgula vaut 6,44 pouces de Bologne.

Enfin, épuisant complètement le sujet, il donne un moyen facile pour retrouver partout et facilement les mesures qu’il propose : pour cela il les relie à la longueur du pendule à seconde, et, par diverses expériences fort concordantes, il trouve que sa virgula est de la même longueur que le pendule simple qui, à Lyon, exécute 3959,2 oscillations en une demi-heure.

On voit que le projet de Mouton est, sans aucune différence de principe, celui qui a été réalisé par notre Système métrique

Prieur, qui avait été aidé des conseils de Guyton de Morveau, rejette les mesures basées sur la grandeur du méridien, parce que, dit-il, " indépendamment de la grandeur de l'opération primitive nécessaire à cet objet, de l'embarras de la vérifier, de l'impossibilité même de le faire journellement, il n'est pas aisé de prononcer sur le degré d'exactitude que cette méthode peut comporter ".Il préfère donc la longueur du pendule à seconde, et comme, dit-il, on n'est pas sûr que la gravité soit la même sur tous les points d'un parallèle, il faut adopter celle d'un point spécial ; et il se prononce pour l'Observatoire royal de Paris. L'étalon serait une règle de platine déposée à l'hôtel de Ville et qui, à la température de 10° par exemple, reproduirait la longueur du pendule à seconde. Le tiers de cette longueur serait le pied national ou français, subdivisé en 10 pouces, le pouce en 10 lignes, etc. Inversement, 10 pieds formeraient la perche nationale, etc. Puis un carré de 10 perches de côté aurait formé l'arpent national ; les volumes auraient été mesurés en lignes, pouces, pieds, cubes ; enfin, le poids de 10 pouces cubes d'eau distillée prise à une température déterminée, aurait été la livre nationale ou étalon de poids. Pour les monnaies, Prieur propose les dénominations de décime et de centime pour désigner le dixième et le centième de la livre monnaie.

Entre 1889 et 1960, le mètre était défini par la distance entre deux traits gravés sur le prototype international du mètre en platine iridié conservé au Bureau international des poids et mesures, cette règle étant à la température de la glace fondante et observée dans des conditions spécifiées. L'exactitude optimale était de 2 x 10-7 à 3 x 10-7 en valeur relative, à cause de l'imperfection des traits. On les avait tracés de façon que leur distance soit égale à la longueur de l'étalon à bouts en platine aggloméré construit sous la Révolution française et conservé aux Archives nationales. Cet étalon des Archives avait été ajusté égal à la dix-millionième partie du quart du méridien terrestre. Selon des mesures plus récentes, la longueur du quart du méridien est environ 10 002 288 m.

L'atome et la mécanique quantique

Rendu obligatoire en France comme système de mesure par le décret du 3 mai 1961, le mètre est la longueur égale à 1 650 763,73 longueurs d'onde, dans le vide, de la radiation correspondant à la transition entre les niveaux 2p10 et 5d5 de l'atome de krypton 86.

Cette définition a été adoptée par la Conférence générale des poids et mesures en octobre 1960. Le krypton, qui est un des gaz rares de l'air, est séparé par distillation fractionnée de l'air liquide. Le produit obtenu est un mélange de six isotopes, et l'isotope 86 est le plus lourd ; on le sépare par thermodiffusion. Comme tous les atomes, le krypton 86 peut occuper des états d'énergie quantifiés, qui dépendent des orbites des électrons gravitant autour des noyaux. Deux de ces niveaux sont désignés par les notations 2p10 et 5d5. Lorsque l'atome passe d'un niveau à l'autre, il émet ou absorbe un rayonnement électromagnétique dont la fréquence est imposée par la nature : elle est une caractéristique des atomes de krypton 86, qui sont identiques dans l'univers. Un rayonnement électromagnétique se propage dans le vide avec une vitesse qui est une constante universelle (299 792 458 m/s) ; le quotient de cette vitesse par la fréquence est une longueur, la longueur d'onde, qui est aussi une caractéristique de l'atome. Le mètre est donc maintenant défini par un étalon naturel et indestructible ; de plus, cette définition autorise une précision au moins vingt fois plus fine qu'auparavant.

Dès 1827, Jacques Babinet (1794-1872) affirmait la nécessité de rechercher l'étalon de longueur dans une longueur d'onde lumineuse, et non pas dans les dimensions de la Terre ou d'un objet matériel. Cette idée n'a jamais cessé d'être présente à l'esprit des physiciens, mais il a fallu 133 ans pour trouver une radiation lumineuse susceptible d'être produite avec les qualités de finesse et de simplicité pour que sa longueur d'onde soit un étalon de haute précision.

En effet, les radiations optiques sont loin d'avoir la simplicité qu'on leur attribuait faute de savoir analyser leur structure. Presque toutes sont des multiplets, parfois si serrés que les largeurs des composantes se superposent en partie. Cette multiplicité s'explique par la présence simultanée de plusieurs isotopes et par les orientations quantifiées du noyau par rapport aux électrons périphériques de l'atome. Elle disparaît si l'on isole l'un des isotopes et si l'on choisit un atome dont le noyau soit sans action par son orientation parce qu'il a la symétrie sphérique. Le krypton 86 a ces qualités ; on l'a choisi parmi d'autres en raison de plusieurs circonstances favorables telles que la possibilité d'entretenir une décharge électrique dans le gaz refroidi à basse température, dans l'air liquide, ce qui affine les radiations, et son bas prix. Parmi les nombreuses radiations qu'émet le krypton soumis à une décharge électrique, on en a choisi une, entre les plus fines, qui est dans la partie visible du spectre et dont les propriétés sont le mieux comprises.

Méthodes de mesures

Pour mesurer une longueur à l'aide de la radiation qui sert à la définition du mètre, on opère de la façon suivante. L'objet (règle divisée, cale étalon) à mesurer est placé sur un chariot, de façon que l'origine, puis l'extrémité de la longueur se placent successivement au même point par translation ; le déplacement du chariot est égal à la longueur à mesurer ; un faisceau lumineux qui se réfléchit normalement sur un miroir fixé à l'objet voit son trajet allongé de deux fois cette longueur ; ce faisceau, superposé à un autre faisceau dont le trajet est invariable dans un interféromètre de Michelson, donne des franges d'interférences ; on en déduit combien de longueurs d'onde sont comprises dans la longueur à mesurer. Si ce nombre est 1 650 763,73 et si l'on opère dans le vide avec la radiation de définition du mètre, cette longueur est 1 mètre. Si l'on opère à l'air libre, on applique une correction qui dépend de l'indice de réfraction de l'air, mesuré sur place au même moment.

Précision

La lampe qui produit la radiation du krypton 86 est généralement construite et utilisée selon les spécifications recommandées par le Comité international des poids et mesures ; celles-ci ont été choisies de façon que les influences perturbatrices se compensent : ces influences sont le courant continu de la décharge électrique et l'action des atomes voisins les uns sur les autres ; chacune change la longueur d'onde de quantités inférieures à 10-7 en valeur relative, et leur compensation assure une exactitude meilleure que 10-8, ce qui suffit à notre époque dans tous les cas, sauf exception rarissime.

Cette nouvelle définition ayant été adopté par la 11ème CGPM, sa précision était estimée être 100 fois supérieure à celle de la précédente.

Il sembla bientôt évident que la radiation de référence celle du 86Kr devrait tôt ou tard être remplacée par une radiation de laser.

1983 Le mètre est défini comme la longueur du trajet parcouru par la lumière, dans le vide, pendant une durée de 1/299 792 458 seconde.

Sa précision potentielle est celle de l'unité de temps 100 000 fois meilleure que celle de l'unité de longueur fondée sur le krypton et elle pourra sans doute être encore améliorée. Cette nouvelle définition s'appuie sur une constante physique universelle et non plus sur un objet matériel ni même sur une radiation émise par une substance particulière. Elle aurait donc de très bonnes garanties de pérennité.

En partant d’un mètre étalon matériel, la précision de la mesure ne peut excéder 10-8 or avec la mesure des longueurs d’onde la précision est de 10-11.

 

L'unité de masse : le kilogramme

Les chimistes à la recherche de la masse exacte

Lavoisier a été l'un des premiers scientifiques à s'attacher à la mesure précise des masses. Ses recherches étaient consacrées à la découverte des éléments de la matière, et il se basait sur les résultats massiques pour comparer les produits des réactions chimiques. Même si le découpage des unités était complexe (1 livre = 16 onces, 1 once = 8 gros, 1 gros = 72 grains, 1 livre = 0,48951 kg), tout le travail de précision avait été effectué à l'époque, et la définition du kilogramme a permis de simplifier les modes de calculs, mais l'aspect technique de la mesure n'a eu guère d'évolution à subir.

 

La seule unité définie par un prototype

La première définition de l'unité de masse : le gramme a été édicté par le décret de l'Assemblée du 1er août 1793, il était représenté par un décimètre cubique d'eau. Cette définition fut suivie de celle du gramme, un centimètre cube d'eau à 0°C. Lors du décret du 7 avril 1795, apparaît alors pour la première fois la notion de kilogramme, multiple du gramme. Enfin en 1799 la loi du 10 décembre définit le kilogramme par un cylindre en platine "matérialisant" la masse du décimètre cube d'eau à 4°C. En 1889 lors de la 1ère CGPM, il a été défini comme un cylindre iridié de hauteur égale au diamètre (39mm) conservé au Pavillon de Breteuil, au BIPM. Aujourd'hui, on sait comparer deux masses de 1 kg à mieux que 10-8, soit 0,01 mg.

Mesurer avec précision une masse ne pose pas de problème, la précision des balances est excellente, elle se situe entre 10-8 et 10-9. Toutefois l'exactitude du kilogramme est bien inférieure à celle du mètre, basée sur une donnée pérenne contrairement au cylindre de platine périssable. Le kilogramme reste défini par le prototype international de 1889.

Les précautions à prendre pour lui assurer sa valeur d'étalon

Parmi les sept unités qui sont à la base du Système international d'unités, le kilogramme reste la seule qui soit définie par un prototype international auquel il est nécessaire de se référer. Pour que le prototype du kilogramme conserve une masse constante, il faut qu'il ne perde ni ne gagne de la matière.

Il pourrait perdre de la matière par évaporation, mais il est en alliage de platine et d'iridium, deux métaux réfractaires qui ne s'évaporent pratiquement pas à la température ordinaire. Il pourrait également en perdre par usure, mais on ne le manipule que rarement, une fois en cinquante ans environ. Il ne peut pas gagner de matière par oxydation, étant inoxydable, mais, malgré les précautions prises, il recueille des poussières et peut-être des condensations de vapeurs qui s'enlèvent par un nettoyage délicat mis au point par le Bureau international des poids et mesures. Il ne sert qu'à la mesure de la masse de ses quatre " témoins ", qui sont construits d'une façon aussi identique qu'il a été possible, et des étalons de travail du Bureau international.

Les méthodes d'étalonnage

Ces derniers servent aux étalonnages demandés par tous les pays. La mesure de la masse d'un étalon du kilogramme se fait avec une balance, cet instrument permet de constater l'égalité de deux forces verticales qui s'équilibrent aux extrémités d'un fléau pivotant autour de l'arrête d'un couteau. Si l'accélération due à la pesanteur est la même à l'emplacement des deux étalons de masse (c'est toujours le cas à la précision recherchée), la force de pesanteur, ou le poids, qui est le produit de la masse par cette accélération, est la même si les deux masses sont égales. Les deux masses ne sont jamais rigoureusement égales. Il faut donc rétablir l'équilibre de la balance au moyen de petites surcharges, dont la masse connue est égale à la différence de masse des deux étalons du kilogramme. Si les deux étalons n'ont pas la même densité, la poussée d'Archimède de l'air diminue d'une quantité différente la force exercée aux extrémités du fléau ; il faut donc éliminer cette différence par une correction qui nécessite de connaître le volume de chaque étalon et la masse volumique de l'air où ils baignent.

La précision

La précision relative des mesures de masse, dans les conditions optimales, est comprise entre 10-8 et 10-9.

On a proposé de définir le kilogramme par un multiple d'une masse naturelle constante, celle du proton par exemple. Ce serait déraisonnable, car la précision s'abaisserait à environ 10-5, non seulement sur les mesures de masse, mais encore sur les grandeurs qui en dérivent, telles que la force, la pression, l'énergie, la puissance, les grandeurs électriques, etc.

Un nom qui déplaît

On a proposé aussi de changer le nom du kilogramme, parce qu'il comporte le préfixe kilo, ce qui n'est pas logique pour une unité de base du Système international d'unités. Mais on n'a trouvé jusqu'à présent aucun nouveau nom susceptible d'être adopté universellement et rapidement.

 

L'unité de temps : la seconde

De nos jours, l'unité de temps est aussi définie par les propriétés propres aux atomes, puisque la seconde équivaut à la durée de 9 192 631 770 périodes de la radiation correspondant à la transition entre les deux niveaux hyperfins de l'état fondamental de l'atome de césium 133.

Cette définition, qui a été adoptée en 1967 par la XIIIe Conférence générale des poids et mesures, remplace la définition antérieure, appliquée à la seconde des éphémérides et aux termes de laquelle la seconde est la fraction 1/31556925,9747 de l'année tropique pour 1900 janvier zéro, à 12 heures de temps des éphémérides. Auparavant, la seconde était la fraction 1/86400 de la durée du jour solaire moyen, comme l'avaient légalisée en France la loi du 2 avril et le décret du 26 juillet 1919.

La vraie seconde est aussi appelée seconde atomique afin d'éviter la confusion avec la seconde des éphémérides et la seconde solaire, qui étaient l'une et l'autre des secondes astronomiques.

La seconde solaire

La rotation apparente journalière du Soleil fut de tout temps le repère temporel de la vie humaine ; les calendriers sont des conventions de numérotation des jours successifs et ils constituent une échelle de temps sur laquelle on situe la date des événements. Au moyen d'horloges, on subdivise la durée d'un jour en 24 h de 60 mn, et les minutes en 60 s, soit 86400 s par jour. Les astronomes se chargent de maintenir leurs horloges en accord avec la rotation apparente du Soleil et des astres ; eux seuls peuvent fournir la seconde solaire exacte, qui résulte donc de la subdivision de l'échelle de temps naturelle déduite d'observations astronomiques. La durée qui sépare deux passages successifs du Soleil au méridien est le jour solaire; cette durée n'est pas constante pour plusieurs raisons, la principale étant qu'elle résulte non seulement de la rotation diurne de la Terre autour de son axe, mais encore de la révolution annuelle de la Terre autour du Soleil sur une orbite elliptique, donc avec une vitesse qui n'est pas uniforme. Aussi les astronomes observent-ils non pas le Soleil, mais des étoiles, ce qui leur donne le temps sidéral, d'où l'on déduit le temps solaire moyen. Le jour sidéral est plus court que le jour solaire, d'une petite quantité qui fait un jour de plus par an. L'échelle de temps ainsi obtenue est le temps universel TU ; une petite correction de déplacement du pôle terrestre donne un temps corrigé TU1, une autre correction saisonnière de la rotation terrestre fournit le temps TU2 ; la subdivision de ce temps TU2 donne la seconde solaire.

La seconde des éphémérides

La durée de la seconde solaire, qui résulte de la rotation de la Terre autour de son axe, souffre des irrégularités de cette rotation, découvertes en 1870 par Simon Newcomb (1835-1909). Celui-ci avait remarqué que la position de la Lune et des planètes s'écartait de plus en plus des positions calculées d'après la théorie de la gravitation universelle, et que ces écarts pouvaient s'expliquer par un ralentissement des horloges réglées, sur la rotation de la Terre. Or, une partie de l'énergie cinétique de rotation de la Terre se transforme en chaleur par frottement des marées océaniques. La durée du jour croît de 0,00164 s par siècle ; par l'accumulation de ces retards, le temps universel TU a pris 3 h de retard depuis le début de l'ère chrétienne, par rapport à une échelle de temps qui eût été uniforme. A ce lent ralentissement se superposent d'autres irrégularités inexpliquées, donc imprévisibles. Abandonnant le repère de temps naturel de la rotation de la Terre, les astronomes (Union astronomique internationale, 1952) ont choisi la révolution annuelle de la Terre autour du Soleil, plus précisément l'année tropique, qui est la durée séparant deux passages successifs du Soleil dans la direction du point vernal (intersection de l'écliptique et de l'équateur céleste dans la direction du Soleil à l'équinoxe de printemps). La durée de l'année tropique varie légèrement suivant une loi connue ; c'est pourquoi la définition de la seconde des éphémérides spécifie à quelle date on considère cette durée. La théorie d'ensemble qui prévoit la position des astres du système solaire permet de déterminer une échelle de temps naturelle, dite temps des éphémérides TE, par l'observation de ces astres, en particulier de la Lune, et la seconde des éphémérides s'obtient par subdivision des années de cette échelle TE. On pense que cette échelle est uniforme, avec une approximation d'environ 10-9, limitée par la précision des observations et les approximations des théories. Le progrès par rapport au temps de la rotation diurne de la Terre est d'un facteur 100 environ. Le temps des éphémérides et la seconde des éphémérides ont perdu de leur intérêt (sauf en astronomie) lorsque les étalons atomiques de fréquence et les horloges atomiques, inventés par les physiciens, ont autorisé la définition actuelle de la seconde, qui sert à établir maintenant l'échelle de temps atomique international TAI.

La seconde atomique

L'avènement de la seconde atomique a mis fin à la prédominance immémoriale du temps astronomique, remplacé par le temps des phénomènes quantiques régis par la loi de Planck. Les états d'énergie d'un atome ou d'une molécule forment une suite discontinue de niveaux, avec des intervalles D E ; à la transition entre deux niveaux, l'énergie D E se manifeste sous forme d'une radiation électromagnétique de fréquence n telle que D E = hn (loi de Planck ; h = 6,6262 x 10-34 J.s).

Les premiers étalons atomiques de fréquence utilisaient deux états de vibration de la molécule d'ammoniac NH3 ; puis on a utilisé une transition hyperfine des atomes d'hydrogène H, de césium Cs, de thallium Tl ou de rubidium Rb. En spectroscopie, une transition est dite " hyperfine " lorsqu'elle résulte d'un changement du couplage magnétique entre le cortège électronique et le noyau d'un atome ; une telle transition ne peut exister que si le noyau possède un moment magnétique non nul. Déjà en 1964, des étalons atomiques de fréquence à césium étaient en usage depuis plusieurs années ; par comparaison à la seconde des éphémérides, la fréquence de la transition de cet élément avait été évaluée à 9 192 631 770 ± 20 hertz en 1958, et le Comité international des poids et mesures, habilité par la Conférence générale, avait sanctionné cette valeur afin d'assurer la cohérence des mesures physiques de temps ; la définition atomique de la seconde ne fut adoptée formellement qu'en 1967, lorsque l'étalon de fréquence à césium eut prouvé sa supériorité sur tous les autres pour servir à la définition de l'unité de temps.

L'étalon atomique de fréquence à césium

Il existe quelques étalons de laboratoire sans cesse améliorés, et des centaines d'étalons commerciaux presque aussi exacts, fonctionnant sur le principe suivant. Des atomes de césium sont projetés en jet dans le vide sur une trajectoire qui serait rectiligne s'ils n'étaient déviés à deux reprises par des champs magnétiques ; chacune de ces déviations magnétiques sépare les atomes qui sont dans un des deux états différents de la transition hyperfine de l'état fondamental (ou état normal, celui de plus basse énergie, le plus stable, des états du cortège électronique). D'autre part, au moyen d'un oscillateur à quartz et d'un synthétiseur de fréquence, on produit une radiation électromagnétique dont la fréquence est celle de la transition du césium, et l'on fait agir cette radiation sur les atomes du jet, entre les deux déviateurs magnétiques. Si la fréquence de la radiation coïncide exactement avec celle de la transition, cette transition se produit par résonance, avec un effet détectable après la seconde déviation magnétique. On règle la fréquence de l'oscillateur à quartz de façon à rendre maximal cet effet de résonance, l'atome de césium servant, en quelque sorte, de contrôleur de l'accord entre la fréquence de l'oscillateur à quartz et la fréquence de définition.

Dans les appareils commerciaux, cet accord se fait automatiquement : l'oscillateur à quartz est alors maintenu en permanence sur une marche exacte et constitue une horloge quasiment parfaite. Le gain de précision par rapport à la seconde des éphémérides est un facteur 100, soit un facteur 10000 par rapport à la seconde solaire. De plus, la seconde exacte est disponible immédiatement, et non lus après des mois ou des années d'observations astronomiques et de calculs.

Le temps atomique international et le temps universel coordonné

En accumulant une succession ininterrompue de secondes atomiques, on bâtit une échelle atomique de temps. On a commencé à le faire dès 1955. La Conférence générale des poids et mesures a demandé en 1971 que soit établie une échelle de temps atomique international TAI ; ce temps TAI est réalisé par le Bureau international de l'heure (situé à l'Observatoire de Paris) sur la base des indications d'horloges atomiques fonctionnant dans divers établissements du monde ; les transmissions s'opèrent par voie hertzienne ou par transport d'horloges. Le temps atomique international est le temps de la science, mais il ne convient pas tout à fait pour les usages de la vie courante, qui doit continuer à se régler sur le Soleil et les astres, en particulier pour les navigateurs, qui font le point à l'aide de visées sur les astres et d'un chronomètre capable de leur donner la position angulaire de la voûte céleste en rotation apparente par suite de la rotation de la Terre : les navigateurs voudraient conserver la seconde solaire et le temps universel TU qui lui correspondent, car le temps universel TU est réglé par la rotation de la Terre. Or, le temps atomique international TAI s'écarte progressivement du temps universel TU par suite du ralentissement de la rotation terrestre. On a donc convenu de régler les signaux horaires qui donnent le temps et l'heure pour tous les usages de la vie courante sur une échelle appelée temps universel coordonné TUC : ce temps est obtenu en ajoutant au temps atomique international TAI une seconde intercalaire à la dernière minute d'un mois de façon à maintenir une coïncidence approchée à 0,95 s près. Le temps de nos horloges courantes est donc le temps universel coordonné TUC, modifié éventuellement selon le fuseau horaire, c'est-à-dire que la seconde a bien la durée de la seconde atomique, et les tops des secondes de temps universel coordonné TUC et de temps atomique international TAI coïncident, seul le numérotage des secondes diffère ainsi, à l'instant 1er janvier 1973, 0 h 0 mn 12 s du temps atomique international TAI, le temps universel coordonné TUC était de 0 h 0 mn 0 s ; dans les six mois précédents, la différence était 11 s au lieu de 12, et la dernière minute de décembre 1972 a comporté 61 s dans le temps universel coordonné TUC.

Le Bureau international de l'heure centralise les observations astronomiques, établit le temps universel TU définitif par des moyennes, décide et annonce à l'avance les secondes intercalaires, centralise les indications des horloges atomiques et établit le temps atomique international TAI, donc aussi le temps universel coordonné TUC.

 

L'unité d'intensité de courant électrique : l'Ampère

Définition légale

Sa définition qui fut approuvée par la Conférence générale des poids et mesures en 1948 : l'ampère est l'intensité d'un courant électrique constant qui, maintenu dans deux conducteurs parallèles, rectilignes, de longueur définie, de section circulaire négligeable et placée à une distance de 1 mètre l'un de l'autre dans le vide, produit entre ces conducteurs, une force de 2x10-7 newton par mètre de longueur, le newton étant la force qui communique à un corps ayant une masse de 1 kilogramme une accélération de 1 ms-2.

Détermination

En pratique, celle-ci se fait en utilisant non des conducteurs rectilignes, mais des enroulements à spires multiples afin que la force plus grande puisse être mesurée avec plus de précision. Partant de la force fixée par convention dans la définition, on calcule la force entre les enroulements construits pour l'expérience lorsqu'ils sont parcourus par un courant dont l'intensité est de 1 ampère, ce qui suppose que l'on sache déterminer leur forme et leurs dimensions géométriques ; la meilleure précision s'obtient avec des solénoïdes cylindriques. Pour mesurer la force, on suspend l'un des enroulements au fléau d'une balance, l'autre enroulement restant fixe et placé de façon que la force soit verticale. Si la balance est en équilibre en l'absence de courant, cet équilibre est détruit lorsqu'on lance le courant. On le rétablit par une surcharge dont on détermine ensuite la masse. Dans les meilleures expériences, cette masse est de quelques grammes pour un courant de 1 ampère. La force est le produit de cette masse par l'accélération due à la pesanteur. La valeur exacte de cette accélération doit être mesurée sur place et est de l'ordre de 9,81 m/s. La force étant ainsi mesurée, et la relation entre force et intensité de courant préalablement calculée, on en déduit la valeur de l'intensité du courant en ampères. Une telle mesure, qui ne fait appel qu'à la définition de l'ampère et à la théorie, sans se référer à aucun étalon électrique, est une mesure dite " absolue ", et l'appareil utilisé est une balance de courant.

Cette mesure absolue est très délicate ; elle n'est effectuée que rarement et par des laboratoires spécialisés. On conserve son résultat sous la forme d'étalons permanents, qui permettent de reproduire l'ampère d'une façon plus économique et plus rapide.

Ces étalons sont des étalons de résistance, en fil de manganine par exemple, et des étalons de force électromotrice, qui sont des éléments voltaïques tels que l'élément Weston. On sait mesurer en ohms une résistance par une mesure absolue. Si l'on envoie dans les enroulements de la balance de courant et dans une résistance connue R le même courant électrique d'intensité I, la différence de potentiel qui apparaît aux bornes de la résistance est le produit RI de deux facteurs mesurés l'un et l'autre d'une façon absolue. On obtient donc, en volts, une mesure absolue de cette différence de potentiel, permettant, par une simple comparaison potentiométrique, d'assigner une valeur exacte de sa force électromotrice à un élément voltaïque, qui conservera ensuite cette valeur.

Les étalons de résistance et de force électromotrice peuvent être conservés, transportés ou comparés à ceux d'autres laboratoires ; utilisés conjointement, ils permettent de reproduire l'ampère. Le Bureau international des poids et mesures compare périodiquement les étalons des principaux laboratoires d'étalonnage électrique et assure l'uniformité mondiale des mesures électriques dans les grands laboratoires avec une précision meilleure que le millionième. La valeur assignée à ces étalons nationaux et aux étalons du Bureau international découle d'une moyenne des résultats de quelques mesures absolues faites avec beaucoup de soin dans plusieurs pays du monde.

La conservation de l'ampère au moyen d'étalons de résistance et de force électromotrice ne permet pas d'assurer une permanence parfaite de la valeur de ces étalons pendant plusieurs années. Une autre méthode pour conserver ou reproduire l'ampère utilise la relation qui existe entre la valeur du champ d'induction B, créé en un point à l'intérieur d'un enroulement conducteur parcouru par un courant continu, et la fréquence de précession du proton dans ce champ. Si l'enroulement conserve les mêmes dimensions géométriques, ce dont on peut s'assurer, il suffit de retrouver la même fréquence, que l'on sait mesurer avec une précision surabondante, pour être certain que l'intensité de courant électrique a été reproduit avec la même valeur. Les protons que l'on utilise sont les noyaux des atomes d'hydrogène de l'eau contenue dan un ballon. Avec une bobine auxiliaire on produit momentanément un champ polariseur qui oriente les protons dans une direction perpendiculaire au champ B. Ensuite, pendant quelques secondes, les protons "précessionnent" dans le champ B à la façon d'un gyroscope et induisent un champ périodique dans une autre bobine, auxiliaire; la fréquence induite est mesurable au millionième près.

Si l'enroulement producteur dit champ B a une forme et des dimensions permettant de calculer la valeur de B exprimée en teslas, la fréquence observée est 42,575 9 MHz/T.

Electrodynamornètre-balance,

destiné à la détermination absolue de l'ampère.

 

L'unité de température : le kelvin

La température thermodynamique est une grandeur physique mesurable liée à l'agitation moléculaire, elle est unique et indépendante des propriétés de la matière.

Le Kelvin est défini en assignant la valeur 273.16 K à la température thermodynamique du point triple de l'eau. Le degré celsius (0°C) lui est égal, mais le zéro de l'échelle de Celsius correspond à 273.15K dans l'échelle thermodynamique.

Le point triple de l'eau est la température fixe à laquelle la glace, l'eau liquide et la vapeur d'eau sont simultanément en équilibre ; la présence de toute autre substance est exclue. L'eau pure amenée à son point triple, fournit donc l'étalon de température.

Le choix de la valeur 273.16K ne s'est pas fait au hasard : les points 0° et 100°C de l'échelle Celsius correspondent ainsi aux points de fusion et d'ébullition de l'eau sous la pression atmosphérique normale.

 

 

CONCLUSION

On a vu que les unités de mesures ont eu une histoire très évolutive, qu'on peut séparer en trois grandes périodes :

- l'Antiquité, des premières civilisations à la fin du moyen âge, le commerce utilisait une multitude d'unités sans grande précision, ni définitions particulières.

- l'époque du système métrique mis en place lors de la Révolution Française, il accompagne les balbutiements des sciences qui ont besoin d'étalons précis, et on en profite pour simplifier et unifier le plus possible les grandeurs pour faciliter le quotidien.

- actuellement, les avancées technologiques et les besoins de précision extrême poussent à trouver des étalons de plus en plus fondamentaux, certes exacts, mais difficiles à utiliser directement.

On voit aujourd'hui l'utilité d'utiliser les unités du système international car elles sont de plus en plus souvent des caractéristiques numériques, et elles sont liées par des relations simples ; ainsi toutes les unités dérivent de celles de longueur et de temps.

On est toutefois confronté à l'utilisation d'unités dérivées, souvent inutilement, mais par habitudes de certains milieux scientifiques, et il serait préférable, d'un point de vue pédagogique, que l'utilisation des unités de bases qui facilite la compréhension et les représentations soient utilisées. En effet, si on utilise une seule unité par grandeur, il n'y a pas d'ambiguïté lors de l'utilisation des formules, alors que l'utilisation de plusieurs unités (le litre et le mètre cube par exemple) peut prêter à confusions, et parfois donner lieu à des erreurs.

 

 

BIBLIOGRAPHIE

Encyclopédies :

- La grande encyclopédie, librairie Larousse, 1974

- Encyclopaedia Universalis (CD ROM 1996)

Ouvrages scientifiques :

- BIPM, Le système international d'unités 6° édition, 1991

- G.PRIEUR, M. NADI, La mesure et l'instrumentation, Masson, 1995

- P. GIACOMO, Mesure et métrologie, Bulletin du BNM n°101,1, Chiron, 1995.

- Bureau National de Métrologie, n°103, janvier 1996

Sites Internet :

- Le Système Métrique Décimal (1) : http://www.ilink.fr/~mac/sdm/index.html

- Bureau International des Poids et Mesure (officiel, en anglais) : http://www.bipm.fr

Ouvrages historiques : extraits diffusés sur internet, site (1)

- R. PETIT, Arithméticien décimal. Paris, Dubrock, 1809, p. 80

- A. GUILMIN, Arithmétique à l’usage des écoles primaires et des classes élémentaires. Paris, 1873, p. 12

- M.P. LEYSSENNE, La deuxième année d’arithmétique. Paris, 1888.